L'art
prend racine sur
Millevaches
Le
centre d'Art contemporain
sur l'ile de Vassivière
En quelques années, la Montagne limousine a multiplié les rendez-vous avec l'expression contemporaine. Les centres d'Art de Vassivière en Limousin et Meymac, bien sûr, mais aussi le récent Espace Paul Rebeyrolle à Eymoutiers, le Pré aux Sculptures de Pierre Digan à Saint-Martin-Château, le Sentier des Poètes ou bien encore les oeuvres exposées dans les rues d'Ussel et dans le parc du château à Bujaleuf offrent maintenant aux visiteurs une large vision de l'actualité artistique internationale.
Centre d'Art contemporain
Abbaye Saint-André de Meymac
Comment
expliquer ce foisonnement d'initiatives ? S'agissant le plus souvent de sculpture,
if faut faire la part des suggestions de la nature, de ces beaux granites
de Millevaches, infiniment nuancés, qui invitent les mains créatrices.
Dans la longue tradition de la taille de pierre, la maîtrise artisanale
a, plus d'une fois, révélé un authentique art populaire.
C'est Masgot, petit village de la commune de Fransèches près
de Pontarion, dont François Michaud, tailleur de pierre à la
fin du siècle dernier; a animé les porches et les façades
de ses sculptures naïves. Ce sont aussi, dans le cimetière de
Gentioux, les "ceuvres-tombes" d'un autre Creusois, Jean Cacaud.
Sculpture sur le sentier
des poètes (Lac de Vassivière)
A
l'origine du centre d'Art contemporain de Vassivière-en-Limousin, il
y a également cette idée d'une continuité entre un art
et une terre. Dans le but de compléter et conforter la base de loisirs
lacustres par un tourisme culturel, les initiateurs du projet ont d'abord
mis l'accent sur la sculpture en pierre, en relation avec le caractère
granitique du pays. Trois ans durant, des expositions et des créations
sur le site de l'île de Vassivière ont consacré sa vocation
artistique, avant que la construction des bâtiments, à la fin
des années quatre-vingt, ne vienne donner une autre dimension à
l'entreprise. Défini comme "un lieu de création, d'exposition,
d'information et de formation, plus particulièrement spécialisé
dans le domaine de la sculpture", le centre est une réalisation
de partenariats associant l'État, la Région Limousin et le Symiva
-Syndicat mixte interdépartemental et régional Vassivière-en-Limousin.
S'il s'inscrit dans la politique des centres d'art conduite par le ministère
de la Culture, au cours des années quatre-vingt, sur une quinzaine
de sites, c'est cependant avec une grande originalité. En effet, alors
que la plupart de ces structures ont investi des lieux réhabilités
en milieu urbain -une ancienne écoleà Villeurbanne, usine à
Grenoble -, Vassivière a suscité sa propre architecture. Conçu
par le Milanais Aldol Grossi associé à un confrère régional,
Xavier Cabre, le centre est comme une sculpture majuscule de granite local
et de brique, en parfaite harmonie avec le paysage, le modelé et l'ambiance
de l'île. Dressée à son sommet, en lisière de forêt,
une tour conique mime le signal d'un phare, surmontée d'un clocheton
qu'on atteint par un escalier tournant intérieur : A proximité
immédiate, en contrebas, la galerie: longue nef qui épouse la
pente d'une prairie descendant vers le lac et semble prête à
appareiller. Conjuguant la verticalité forestière et l'horizontalité
lacustre, ces deux bâtiments abritent plusieurs salles d'exposition,
une librairie et une bibliothèque, un atelier d'artiste, ainsi qu'une
cafétéria donnant sur le lac et des espaces polyvalents disponibles
pour les activités pédagogiques, les concerts, les conférences...
Tombe sculptée
(cimetière de Gentioux)
Mais
c'est son projet artistique, fondé sur la relation entre art et nature,
qui donne toute son originalité au centre de Vassivière en Limousin.
Les bâtiments ouvrent sur un vaste parc de sculptures où l'eau
et la forêt ne jouent pas seulement le rôle d'un décor,
mais imposent leur présence aux artistes et participent de leurs démarches
créatrices. Au fil de la promenade, le visiteur découvre et
lit dans leur contexte de nature des oeuvres d'artistes français ou
étrangers qui ont été invités à séjourner
et travailler sur l'île : François Bouillon, David Nash, Kimio
Tsuchiya, Marc Couturier, David Jones, Jean-Pierre Uhlen, Andy Goldsworthy,
Michelangelo Pistoletto, Sylvie Blochel:..
Sur
le flanc opposé du plateau de Millevaches, l'abbaye Saint-André,
à Meymac : autre contexte, autre démarche pour ce centre d'Art
contemporain créé en 1982 et agréé par le ministère
de la Culture en 1985. Il s'agit ici avant tout d'un lieu d'exposition, qui
a redonné vie au principal monument de la ville, dont les bâtiments
abbatiaux du XVIIè siècle ont été réhabilités
pour l'accueillir : Le projet s'avère en fait tout à fait complémentaire
de Vassivière, celui-ci explorant un thème particulier -les
liens entre sculpture et nature- et suscitant des créations, celui-là,
plus généraliste, offrant au visiteur des clés de lecture
pour comprendre l'expression contemporaine et son évolution. Sa spécificité
réside dans la programmation, qui associe chaque année des expositions
personnelles, principalement de jeunes artistes français (Claude Lévêque,
Didier Marcel, Bernard Quesniaux...), une rétrospective monographique
importante (Robert Jacobsen, Jesus Rafael Soto, Markus Lüpertz, François
Bouillon...) et une exposition thématique conçue comme une réflexion
sur les grandes tendances de l'art d'aujourd'hui.
Parlant de la Creuse, Françoise Chandernagor évoquait "ce
jardin où l'art pousse aussi simplement que les petits chênes".
Aujourd'hui, les lieux de création et d'exposition prennent racine
avec bonheur dans la terre de Millevaches.
Jacques TANNEAU
(Source : guide Chamina sur le Plateau de Millevaches)
Abbaye Saint-André
(Meymac)